Référence de l’édition utilisée :
Fulgence Girard, « Aux mânes du général Valhubert », poème, p.1 dans « Gloires militaires de la Révolution Française » |
Le général Valhubert, de son vrai nom Jean-Marie Mellon Roger (Avranches 1764 – Brünn 1805) était comme un héros des armées de la 1e république (lire sa fiche sur wikipédia).
Dites-leur que la représentation nationale a déclaré qu’ils ont bien mérité de la Patrie.
(La Convention.)
Déchirant en lambeaux les langes de l’enfance, Dont il était emmailloté, Après un long travail, le géant de la France Naît enfin à la Liberté. Oh ! C’est un fort enfant ! — Ses yeux s’ouvrent à peine Aux rayons d’un soleil nouveau, Qu’il étouffe en ses bras les serpents dont la haine Avait entouré son berceau. Il bégaye, — et sentant leur trône qui vacille, Les rois pâlissent sous leur dais ; Il marche, — et d’un seul pas il broie une bastille, D’un pas… il écrase un palais ! Et lorsqu’à vos yeux, Rois, d’un souffle, sa colère Fait voler un trône en éclats, Vous croyez, arrachant cet Anthée à la terre, Pouvoir le briser dans vos bras !… —Eh bien !… que leur orgueil lui forge des entraves ! Qu’ils rêvent à river ses fers ! Tant mieux ! — ses cris de gloire, éveillant leurs esclaves, Régénéreront l’univers ; Tant mieux ! — le sang du peuple a sur leur diadème, Pour le sacrer, coulé long-temps ; A leur tour ! s’il en faut pour bénir son baptême, Que ce soit celui des tyrans. Que son chêne, germant sur un champ de victoire, Croisse et de sa fécondité Couvre le monde ! — Et puis les palmes de la gloire Vont bien à ton front, Liberté !
II.
Ce furent de beaux jours ! beaux jours où, notre terre, Sol épuisé par les abus, Comme aux brises du ciel, au souffle populaire, Verdit de gloire et de vertus ; Où tout ce que le cœur a de plus chastes flammes, Honneur, Liberté, purs rayons, Sous leurs ailes de feu, dans le creuset des âmes, Épurèrent les passions ; Où, quand pour attaquer l’aigle jusqu’en son aire, Les vautours fondaient de leurs monts, Ouvrant leurs jeunes becs, pour défendre leur mère, S’élancèrent tous les aiglons. — Car ce peuple voulut, sur un champ de bataille, Vainqueur, se dresser libre et fort ; Ou trahi par le Ciel, sur un lit de mitraille, S’endormir libre dans la mort.
III.
Combien d’hommes de cœur, de ces âmes puissantes Où couve tout un avenir, Au sein d’un peuple libre, étincelles dormantes, N’attendaient qu’un choc pour jaillir. Hoche, Joubert, Desaix, Valhubert, la Patrie, Brûlant vos cœurs, armant vos bras, De son regard de feu mûrit votre génie Sous la mitraille des combats. Gloire à vous ! Car alors qu’une ligue ennemie Déployait son pâle étendard, Lorsque son char allait passer sur la Patrie, Vous vous jetâtes sous son char ! Gloire à vous ! car au jour où la France éperdue Surgit terrible, — jours derniers Où de la Liberté l’on voile la statue, — Vous la couvrîtes de lauriers !Qu’au sein de nos remparts se dressent vos images ; Terrestres immortalités, Qu’elles soient dans nos jours de crises et d’orages, Les Palladium de nos Cités. Devant ces marbres saints toute haine s’apaise ; Les partis joignent leurs drapeaux ; A l’heure des dangers, comme dans la fournaise Bouillent, se fondent les métaux ; Les Français confondant leurs âmes frémissantes, Dans le Culte qui les unit, Verraient les passions se briser impuissantes Contre vos socles de granit ; Car lequel oserait forfaire à la Patrie ; Oserait lever sans rougir Son front flétri, — son front chargé d’ignominie, — Devant votre front de martyr !
IV.
Cet amour du pays, feu sacré, dont vos âmes Recélaient les vives ardeurs, Comme sur un autel, — lampe aux célestes flammes, Brûle encore au fond de nos cœurs. Si jamais, profanant notre saint territoire, L’étranger veut, dans son orgueil, Ajoutant un feuillet de honte à notre histoire, Voiler notre front d’un linceul ; S’il faut que de nouveau le glaive de la guerre Déchire un drapeau détesté ; S’il nous faut, de nos os, dresser sur la frontière Un autel à la Liberté ! Toi, qui, de ces Tyrans, vingt fois rompis les chaînes, Valhubert, alors tu verras Que c’est bien ton beau sang qui brille dans nos veines ; Ce sang — n’y dégénère pas !Fulgence Girard.— Bacilly. — Septembre 1832 —
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Photo: la statue du général Valhubert à Avranches, par Ikmo-ned, (ɔ) LDL-GNU 1.2+ et CCA-SA 3.0, statue par Pierre Cartellier, domaine public.